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Par Bruno Deshoulières
Publié en ligne le 30 août 2006
Résumé : Le simple repérage de documents n’est qu’un premier pas dans le processus qui conduit à la maîtrise de l’information. Une démarche de recherche documentaire efficace, formatrice, suppose un cadre méthodologique : de la position d’un problème à la diffusion des résultats obtenus. Si le rôle du dispositif informatique est important, l’accompagnement pédagogique est indispensable afin que l’objectif de la recherche, l’accès à la connaissance, puisse être obtenu.
Sommaire
L'information est un mot, un concept, qui a pris une place centrale dans les débats sur le thème des techniques éducatives. On parle de société de l'information, de technologies de l'information, d'accès à l'information, etc. Les acteurs du système éducatif, et donc en premier lieu les enseignants, à l'école ou à l'université, subissent de fortes pressions dans le sens de l'intégration des nouvelles technologies de l'information et de la communication dans leurs activités. La réflexion s'engage alors bien souvent sur les questions techniques, sur les outils, alors que le problème se situe davantage dans le rôle que joue l'information dans l'acte d'apprendre ou de se former.
Je discuterai donc d'abord du lien qui unit information et enseignement avant de présenter le concept de maîtrise de l'information qui sert de cadre de référence dans la mise en place de certaines formations méthodologiques à l'université. Enfin, je proposerai un ensemble de fonctions qui permet selon moi de définir un système informatisé (un intranet de formation ?) apte à accompagner pédagogiquement un élève ou un étudiant dans sa formation à la maîtrise de l'information et capable de faciliter le travail des enseignants dans la mise en œuvre d'un dispositif pédagogique.
Avant de nous confronter à nos rapports à l'information dans nos situations de formation, rappelons que plusieurs sens peuvent être donnés à ce terme selon le rôle joué par l'individu vis-à-vis de cette information. Si je suis acteur de mon information, celle-ci doit être comprise au sens de l'information que l'on va chercher, l'information désigne alors également l'action de s'informer, de prendre des renseignements. Au contraire, si ma position est passive, l'information est l'ensemble des données, renseignements ou nouvelles que l'on m'adresse. Il s'agit là, principalement, des informations des médias (presse, radio, télévision…). Enfin, l'information, au sens de la théorie de l'information et de la communication, est un ensemble de données qui s'échangent entre des systèmes compatibles entre eux, c'est-à-dire aptes à coder ou décoder, recevoir ou envoyer, assimiler ou mémoriser les données échangées. Par exemple, des humains s'échangent des données codées sous forme de sons, de gestes, d'écrits… Les ordinateurs s'échangent des données sous forme d'un ensemble de 1 et de 0. Les cellules vivantes s'échangent des informations sous forme chimique, etc. Si l'on veut étudier la place de l'information dans l'enseignement, les trois sens donnés à ce terme sont à prendre en considération.
N'est-t-il pas de la responsabilité de toute institution de formation de donner les moyens à l'apprenant (élève, étudiant, homme dans la vie) de maîtriser l'information dont il a besoin pour sa formation, son développement, se projets… Pour maîtriser l'information, il faut avoir des accès possibles à l'information, mais il faut également avoir des capacités et des méthodes pour la sélectionner, la traiter et l'exploiter. L'enseignant n'est donc pas seulement l'équivalent d'un média qui adresse de l'information vers une cible - des connaissances vers l'apprenant - il est également celui qui essaie de faire acquérir des aptitudes à la maîtrise de l'information (celle qu'il délivre et celle que l'apprenant essaiera de chercher de lui-même). Les aspects techniques de présentation de l'information (quel support ? quelle mise en forme ?), s'ils ne sont pas sans conséquences, sont cependant à traiter dans l'optique de la capacité de l'apprenant à gérer un processus global de gestion de l'information.
Prenons l'exemple d'un enseignant-chercheur officiant dans une de nos universités françaises. Observons le tout d'abord dans ses fonctions de chercheur, puis dans ses fonctions d'enseignant. Nous pourrons ainsi mieux comprendre la place réservée à l'étudiant dans le dispositif de formation traditionnel.
Un chercheur est une personne responsable qui, pour éviter de dépenser l'argent du contribuable inutilement, s'assurera par une étude approfondie et régulière de la littérature scientifique, que les recherches qu'il entend mener n'ont pas déjà été traitées avec succès par des chercheurs concurrents mais néanmoins proches collègues. Le chercheur est donc d'abord un lecteur d'information avant d'être un producteur d'information (figure 1). C'est seulement parce qu'il a connaissance des travaux achevés ou en cours au sein de la communauté scientifique qu'il sera apte à apporter lui-même des connaissances nouvelles. Pour acquérir cette connaissance, il se déplacera dans des colloques, congrès, symposiums, il s'abonnera à des revues spécialisées, il surveillera la littérature scientifique en consultant des bases de données spécialisées, etc. Si les travaux de notre chercheur débouchent sur des choses nouvelles (des connaissances, des théories, des données expérimentales, etc.), il devient à son tour producteur d'information, car là encore, il sait qu'il doit accomplir cet acte citoyen, bon pour sa carrière, qui consiste à communiquer à ses pairs ou à un plus large public l'intérêt majeur de ses recherches et donc à confirmer le bon emploi de l'argent public investi.
Le cycle de l'Information Scientifique et Technique.
Notre chercheur devenu enseignant se présente devant ses étudiants pour délivrer un enseignement. Pour préparer son enseignement, l'enseignant a tout d'abord été, comme dans sa situation de chercheur, un lecteur d'information. C'est en confrontant ses propres connaissances avec celles des autres enseignants, qu'il a pu élaborer une synthèse des connaissances à transmettre et utiles à l'étudiant dans un contexte d'étude programmé et organisé. L'enseignant n'ignore pas que son enseignement prend place dans un cursus finement élaboré (dans une difficile concertation avec ses collègues de l'équipe pédagogique).
On y trouve par exemple les travaux réalisés par les élèves dans le cadre de groupe classe ou de projets spécifiques à un groupe (atelier de pratique scientifique, atelier d'écriture, Activités Complémentaires de Formation, Travaux Personnels Encadrés, etc.) et des travaux réalisés par les enseignants, des données spécifiques et protégées mises à disposition suivant des droits particuliers (données administratives et pédagogiques pour l'essentiel). ·
C'est là qu'est le paradoxe. Notre enseignant, notre chercheur, qui passe son temps à gérer de l'information, à faire un travail de synthèse, transmet des connaissances à un public étudiant qui bien souvent reçoit cet enseignement de manière très passive (alors qu'il devrait s'investir considérablement pour assimiler et comprendre l'information reçue).
La différence fondamentale entre l'enseignant-chercheur et l'étudiant est que ce dernier est rarement en situation de résolution de problème avec tout ce que ce concept englobe, dont la recherche, la gestion et le traitement de l'information. Bien évidemment, le rôle de l'enseignant comme transmetteur de connaissances est indispensable, car il évite à l'étudiant de perdre son temps en refaisant par lui-même le chemin parcouru par son enseignant. Néanmoins, un équilibre reste à trouver pour redonner à l'étudiant un rôle d'acteur de sa formation. Dans sa vie professionnelle, l'étudiant n'aura plus d'enseignant pour lui donner les connaissances nécessaires à la résolution des problèmes qu'il rencontrera. Et si le rôle de l'université est de préparer à la vie professionnelle future, alors elle doit davantage donner aux étudiants cette capacité à gérer des problèmes, des situations, des objectifs…
Les réformes actuelles du secondaire ou du supérieur vont dans ce sens : travaux croisés et travaux personnels et encadrés dans les collèges et les lycées, méthodologie du travail universitaire et travaux d'études et de recherches dans les premiers et seconds cycles universitaires. Des enquêtes montrent qu'une majorité d'universités françaises ont mis en place des unités d'enseignement (U.E.) en rapport avec la méthodologie. À l'examen du contenu de ces U.E. on peut constater une assez grande disparité, naturelle eu égard à la nouveauté de la démarche. Car s'interroger sur les méthodes de travail avec les étudiants, c'est se poser des questions sur ce qu'est la nature de l'acte d'apprendre et à quels processus psycho-socio-cognitifs cet acte renvoie.
Il n'est pas dans mes intentions de répondre à des questions aussi vastes qui font appel à des connaissances issues de nombreuses disciplines (psychologie, didactique, sciences de l'éducation…). Je me contenterai de décrire le concept de « Maîtrise de l'information »1 et les actions de formation que nous proposons dans ce cadre. Je m'appuierai pour cela sur notre expérience des formations à l'information telles que nous les avons développées depuis plusieurs années dans notre Faculté des Sciences de l'Université de Poitiers. Ces formations sont un des moyens susceptibles de replacer l'étudiant en situation d'acteur de sa formation. Elles apportent individuellement des éléments méthodologiques réutilisables dans de nombreuses situations au cours du parcours universitaire ou plus tard dans la vie professionnelle ou personnelle.
Cette notion de maîtrise de l'information est relativement nouvelle en France, elle englobe un ensemble de compétences qu'un individu doit pouvoir acquérir pour lui permettre de tirer le meilleur parti de cette « société de l'information » qu'on lui promet. Ces compétences que je rappelle ici renvoient également à des concepts plus anciens tels que la culture de l'information (culture litteracy) ou la formation des usagers (library user education)2 :
savoir définir son besoin d'information (savoir poser le problème) ;
savoir où et comment trouver l'information (identification des sources, techniques documentaires, recherche d'information) ;
savoir gérer sa documentation, organiser, planifier …
savoir évaluer un document, mettre en perspective l'information proposée et faire l'analyse critique de son contenu ;
savoir lire, comprendre, extraire l'information essentielle ;
savoir exploiter, mémoriser et synthétiser l'information recueillie ;
savoir communiquer le résultat de son travail sur l'information (communication orale, écrite, numérique).
Les compétences à acquérir sont nombreuses, mais les formations à la maîtrise de l'information ne se limitent pas au simple repérage de documents, elles visent au contraire à favoriser le passage de l'information à la connaissance (ensemble d'informations assimilées, cohérentes et réutilisables)3 . Bien évidemment, la nature des compétences à acquérir évolue avec « la diversité et l'évolution rapide des services, des contenus et des outils depuis le développement d'Internet »4. Cependant, les aspects technologiques de l'accès à l'information ne sont qu'un élément parmi d'autres dans la chaîne des aptitudes à acquérir pour l'apprenant.
De même que le système informatisé que nous préconisons devra répondre aux exigences des objectifs pédagogiques visés et cités ci-dessus, il devra également permettre et favoriser la méthode pédagogique préconisée pour les formations à la maîtrise de l'information. La méthode repose sur 4 principes fondamentaux :
Si les apports théoriques et magistraux ne sont pas à exclure, un travail en petit groupe sur un véritable projet d'étude est nécessaire.
Ce projet doit englober toute la démarche informationnelle, de la définition du projet (le besoin d'information) à la communication du résultat final (en passant par la recherche d'information, sa gestion, son traitement, etc.).
Ce travail réalisé doit être commenté et validé par l'enseignant mais il doit également être diffusé (sur le Web, par exemple, si l'on dispose d'un dispositif prévu à cet effet).
Il est préférable que le projet soit inscrit dans une discipline suivie par l'étudiant et que l'étudiant soit accompagné et guidé par une personne maîtrisant le domaine traité.
Ces préconisations restent valables quel que soit le niveau d'étude.
Les formations à l'information se généralisant dans notre faculté, le nombre de projets étudiants à suivre s'est très largement accru. L'équipe enseignante nécessaire à la conduite des formations s'élargissant elle aussi, nous avons voulu nous doter d'un système informatisé qui soit une aide autant pour les enseignants que pour les étudiants. Le dispositif a été défini en fonction de nos choix pédagogiques, autant du point de vue des objectifs à atteindre que des méthodes à suivre. Voici les 4 fonctions principales du système conçu5 et en cours d'expérimentation :
Le système permet à chaque enseignant de créer un compte pour chaque projet étudiant à l'intérieur d'une filière d'enseignement. Le système gère alors des droits, des espaces de travail et des services (messagerie, répertoire web, transfert de fichier, consultation), selon que l'utilisateur du système est un enseignant, un commanditaire d'étude, un étudiant ou un lecteur extérieur. Le système gère également un annuaire pour faciliter la communication entre chacun.
La bibliothèque universitaire propose un catalogue informatisé de ses ouvrages ainsi que des ressources accessibles par un serveur de CD Rom (Universalis, PASCAL, Généralis, Docthèses...). L'Internet donne la possibilité d'atteindre de multiples sources d'information et propose des outils de recherche nombreux et variés. Le problème pour l'étudiant est l'adaptation de ses techniques et de ses stratégies de recherche à ses besoins d'information. Le système que nous voulons mettre en place doit proposer une aide à la définition du besoin d'information, à l'identification des sources d'information pertinentes, il doit également aider à la formulation et à la reformulation des requêtes (car, malheureusement, les systèmes d'information des bibliothèques actuels ne proposent pas de véritables support à l'interrogation)6 .
Le système offre aux étudiants la possibilité de gérer leurs données grâce à une base de données de références bibliographiques personnalisée. Les étudiants d'un même groupe peuvent donc partager leurs références et leurs commentaires sur ces références, par le biais d'outils de saisie, de recherche et de présentation des références.
Une fois le travail sur leur projet bouclé, les étudiants conçoivent un dossier au format HTML regroupant plusieurs rubriques dont une présentation du projet, des commentaires sur la démarche de recherche d'information et une synthèse de l'information recueillie avec bibliographie. Ce dossier peut être un simple portail vers des données sur Internet, il peut aussi être un rapport d'étude très complet sur un sujet spécialisé. Le dossier est validé par l'enseignant qui lève alors les restrictions sur les droits d'accès. C'est à dire qu'un lecteur extérieur pourra, par le biais d'une base de projet, avec un outil de recherche associé, retrouver et consulter librement le dossier étudiant. Ceci suppose donc que le système ait indexé chaque dossier étudiant.
Avant de commencer à concevoir notre propre système informatisé (en 1998), nous avons cherché parmi les produits existants sur le marché si l'un d'eux répondait à notre cahier des charges. Dans la négative, nous avons opté pour la réalisation d'un produit nouveau. Le travail a été confié à des étudiants en informatique (licence et maîtrise). Aujourd'hui nous disposons d'une nouvelle version sécurisée, partielle et en cours d'évaluation. L'application développée repose sur un système informatisé aux caractéristiques suivantes :
plate-forme Linux, ·
serveur Web Apache, ·
base de donnée PHP/SQL, ·
interface HTLM unique pour tous avec droits différents selon les services.
Aujourd'hui, pour passer à une utilisation généralisée et stable nous sommes devant un nouveau choix. Ou bien les nouveaux produits sur le marché correspondent tangiblement à nos besoins et nous nous adaptons à eux ou bien nous trouvons les moyens humains et financiers pour faire aboutir notre propre solution. Dans cette dernière hypothèse, notre intention est d'arriver à un produit diffusable et facile d'installation et d'utilisation. Ce produit pourrait certainement intéresser d'autres établissements de formation que le nôtre.
Pour citer cet article : Deshoulières Bruno (2002). "Accompagner les élèves / étudiants dans la recherche, la gestion et la diffusion de leurs informations documentaires - Accompagnement pédagogique et dispositif en ligne". Actes des Troisièmes Rencontres Réseaux Humains / Réseaux Technologiques. Poitiers, 19 mai 2001. "Documents, Actes et Rapports pour l'Education", CNDP, p. 97-113.
En ligne : http://edel.univ-poitiers.fr/rhrt/document492.php (consulté le 1/10/2019)
Notes
Bibliographie
BERNHARD P., La formation à l'usage de l'information : un atout dans l'enseignement supérieur - Un état de la question. Documentation et bibliothèques 46, n°2,:63-75, 2000.
CARON A.. La synthèse - Produit documentaire et méthode pédagogique. ADBS Editions. Paris 1997. 208 p.
CHARTRON G. Formations à l'IST : quels changements ? Arabesque n°12, 1998.
DESHOULLIERES B., & BLASI P. (1998). Un dispositif pédagogique et un système hypertexte pour l'enseignement de la maîtrise et de la production de l'information scientifique dans un cadre universitaire. In Hypermédias et apprentissages, Actes du quatrième Colloque, Univ. de Poitiers, 15-17 oct. 98. Edités par J.F. Rouet et B. de La Passardière. Paris : INRP et EPI, 1998, p. 303-308.
JOLY M., et al. SAPRISTI - Sentiers d'Accès et Pistes de Recherche d'Informations Scientifiques et Techniques sur l'Internet ! Une méthode de recherche d'information conçue par des professionnels de la documentation. [On-line]. Villeurbanne (Fr) : Inst. Nat. Sci. Appl., Doc'INSA, 1996 [modifié en 2001]
Available from internet : URL: http://csidoc.insa-lyon.fr/sapristi/digest.html
LEFORT G., Savoir se documenter, Method'SUP - Les éditions d'organisation, 1990.
PANIGEL C., DESHOULLIERES B. et al., Former les étudiants à la maîtrise de l'information - Repères pour l'élaboration d'un programme. Paris : Ministère de l'Éducation Nationale et de la Recherche, 1999, 85 p.
REBOUL O., Qu'est-ce qu'apprendre, 3ème édition, PUF, Paris 1988.
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