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Des usages attendus aux usages effectifs dans l’ENT de l’UNR-Languedoc Roussillon

Troisième partie - Des analyses d'usages

Par Chantal Charnet

Publié en ligne le 1 septembre 2006

Résumé : Cette étude vise à évaluer les écarts entre les pratiques attendues par les concepteurs du projet, les décideurs universitaires et leur appropriation effective par les étudiants, par le biais d’une méthodologie de la confrontation. Elle a également recours à l’analyse conversationnelle, sur la base  d’extraits d’échanges entre acteurs engagés dans la mise en place de l’ENT. En effet, l’explicitation des usages potentiels constitue un socle référentiel où attentes et intentions pourront être confrontées aux usages effectifs. Les activités humaines supportées par les artefacts prônées dans cette phase d’explicitation sont dégagées, ceci s’inscrivant dans une réflexion sur les relations de l’objet à l’action, en particulier celle avec des objets informationnels, en référence à la théorie de l’Action Située (J. Lave, L. Suchman). L’analyse des phénomènes verbaux et gestuels émis sur ces pratiques par les acteurs engagés dans le projet fait référence à la problématique des “cadres de l’expérience� proposée par E. Goffman  (1974/1991).

Dans le cadre de la mise en œuvre des environnements numériques du projet Université Numérique en région Languedoc Roussillon (2004-2005), une pré-enquête sur les usages éducatifs des environnements numériques de travail (ENT) est en cours. Plus spécifiquement, le projet ENTICE1 retenu dans le cadre du 2ème appel à projet « Usages de l’Internet »2 constituera la toile de fond de notre réflexion. Il a pour objectif de rendre compte des usages éducatifs dans les pratiques émergentes d’un espace numérique de travail (ENT) pour les Universités de Montpellier 1, 2, 3 et Perpignan. Nous abordons d’abord une réflexion sur les orientations méthodologiques, puis nous présenterons deux séquences vidéo qui illustreront quelques phénomènes en cours d’exploration.

Comment repérer et analyser des usages liés à la mise en place de dispositifs technologiques dans l’Enseignement Supérieur ? Telle est notre interrogation dans le cadre du projet ENTICE. L’ENT3 « désigne un dispositif global fournissant à un usager un point d’accès à travers les réseaux à l’ensemble des ressources et des services numériques en rapport avec son activité. Il est un point d’entrée pour accéder au système d’information de l’établissement ou de l’école. » (2004 : 4). Celui-ci « s’adresse à l’ensemble des usagers, élèves, parents d’élèves, étudiants, enseignants, personnels administratifs, techniques et d’encadrement des établissements d’enseignement. » (2004 : 4). L’un des volets d’étude du projet ENTICE est l’observation des usages éducatifs d’Internet dans le cadre de l’UNR- Languedoc Roussillon.

Mais précisons d’abord ce que l’on entend par usage. Les usages sont des comportements individuels ou collectifs repérables car souvent systématiques dans les différentes activités des individus. Ils sont situés c’est-à-dire effectivement engagés dans l’accomplissement d’une activité réelle et placée dans sa temporalité (Heath et Luff, 2000). En outre, ils ne peuvent pas être considérés comme apparaissant à l’improviste au moment où un usager prend possession du dispositif, ou à une autre phase d’utilisation. En effet, les usages ont une antériorité constitutive que nous prendrons en compte lors de l’observation. En fait, ils sont issus d’une réflexion, dans notre cas pédagogique et technologique, qui préfigure des attendus dans les pratiques. Les besoins des étudiants et des enseignants, tels qu’ils sont perçus par les décideurs, interviennent dans le choix de l’espace numérique ; celui-ci doit être à même de répondre aux objectifs d’usages posés comme indispensables. La contrainte technologique ne doit pas être minimisée car elle oriente, de par ses potentialités, la fonctionnalité de l’outil qui participe, matériellement et par le biais d’artefacts cognitifs, aux activités des usagers. Des contraintes afférentes à l’ordre politique doivent être reconnues car les décideurs ont un pouvoir essentiel dans la mise en œuvre du dispositif.

Une politique universitaire non engagée dans le processus technologique ne favorisera pas une pratique effective rapide et ne pourra donc pas soutenir des actions communicatives dans ce sens. Enfin, un autre élément doit être pris en considération, c’est l’innovation dans un contexte éducatif non encore rôdé à des activités utilisant les nouvelles technologies. En fait, les pratiques émergentes, les cadres primaires4  ne sont pas encore véritablement ancrés, ni chez les participants au projet ni auprès des personnes impliquées dans le projet. L’innovation présente aussi une particularité : elle influence le discernement que nous avons de telle ou telle activité, et ce, tout au long de la mise en place des dispositifs. Comme le note Elizabeth BRODIN (2002 :152), « La sociologie des innovations [Latour93]5 nous rappelle que le processus d’innovation se développe dans un environnement qui se modifie en même temps que le projet et avec lui, selon un phénomène de recomposition mutuelle. Ce n’est pas la qualité de l’idée originelle qui fait celle de l’innovation, mais ce qui se passe pendant le processus (facilement contrarié, perturbé par des aléas divers) et fait que les bonnes idées arrivent plutôt vers la fin [LhommeFleury99]6.». Ainsi, si les usagers s’orientent volontairement dans l’innovation ou même s’ils s’y voient forcés, des modifications de comportement apparaissent dans les usages attendus au cours de l’installation et durant le déroulement des activités. Les pratiques innovantes se modifient au fur et à mesure du développement du dispositif.

Mais la question se pose de comment observer, comment décrire, voire comprendre les usages en question. Nous choisirons de nous placer dans une perspective d’analyse conversationnelle où l’analyse des productions verbales (et non-verbales) permet d’accéder aux connaissances et aux croyances des acteurs sociaux. De plus, la notion de script nous offrira la possibilité de réfléchir au cadre dans lequel s’accomplissent les activités observées et de prendre en considération les conduites attendues. Enfin, nous ferons référence à la notion de cadre telle qu’elle est présentée par E Goffman (1974/1991 : 19)) : « Je soutiens que toute définition de situation est construite selon des principes d’organisation qui structurent les événements – du moins ceux qui ont un caractère social – et notre propre engagement subjectif. Le terme de « cadre » désigne ces éléments de base. L’expression « analyse de cadres » est, de ce point de vue, un mot d’ordre pour l’étude de l’organisation de l’expérience. ». Afin d’analyser l’expérience que font les usagers des ENT, nous nous intéresserons aux différentes phases de mise en place et du déroulement du dispositif. L’étude des « cadres primaires », « qui nous permettent de localiser, de percevoir, d’identifier et de classer un nombre infini d’occurrences entrant dans leur champ d’application » (30) propose une orientation méthodologique pertinente pour notre recherche.

Nous devons enfin nous interroger sur les angles d’analyse. Comment celle-ci doit-elle s’orienter ? Quelle est la focale à choisir ? Et pour s’accorder avec la méthodologie d’E. Goffman (1974/1991), nous dirons que cette description peut se faire « en gros plan ou à distance » (16) sachant qu’un problème identique se pose quant à la perspective. En effet, pour une même situation, différents points de vue s’expriment. Aussi, pour pallier toutes ces atteintes de la réalité, nous appuierons-nous, dans la mesure du possible, non pas sur des séquences « rétrospectives » (18) mais sur des activités en cours.

Une méthodologie de la confrontation sera pratiquée ; elle consiste à comparer les usages attendus et effectifs. Pour construire celle-ci, une analyse se déroulera sur deux plans « à distance » et en « gros plan », les usages attendus et effectifs seront croisés pour confirmer ou infirmer les observations effectuées. Nous alimenterons une étude comparative entre les différentes phases d’installation et d’exploitation du projet puisque nous viserons une étude sur les relations entre conception et utilisation7 pour analyser plus particulièrement les usages éducatifs. Dans la mise en place d’un ENT, le choix du dispositif technologique constitue une phase importante puisque des comportements ont été prévus par les concepteurs dans son fonctionnement technique et dans ses possibilités technologiques. De plus, les décideurs (responsables pédagogiques et administratifs) ont des attentes en relation à leurs pratiques et à celles des autres catégories. Ces anticipations sont en relation avec les possibilités technologiques du dispositif proposé.

Les décideurs attendent en effet un autre déroulement des procédures nécessaires dans l’accomplissement de la vie universitaire. Cela concerne essentiellement les domaines de l’information, de l’inscription, de la gestion des ressources, de la transmission du savoir, etc. Afin de transmettre au personnel enseignant et administratif et aux étudiants, les attentes prévues, des  opérations de communication et d’information sont nécessaires. Enfin, les usagers (étudiants, enseignants, administratifs) vont prendre le dispositif en main et s’en servir dans le quotidien. Des problèmes d’équipement se posent également pour accéder au dispositif. En fait, à l’initiation des usages attendus, deux points de vue convergent pour motiver leur déroulement, celui du concepteur qui façonne un produit pour initier des pratiques répondant au cahier des charges à la base de la réalisation du produit, et celui du décideur qui choisit le produit et oriente par des actions coordonnées l’utilisation du dispositif l’incluant dans une démarche plus globale. Le projet ENTICE a ainsi pour objectif de comparer les usages éducatifs initiés par les concepteurs, prescrits par les décideurs universitaires et effectivement réalisés par les étudiants, enseignants et administratifs.

Dans l’analyse spécifique à ce projet, les données seront constituées par des productions réalisées in situ et seront des séquences vidéo enregistrées mais aussi des productions antérieures ou postérieures aux activités enregistrées. Les enregistrements et la récolte des données doivent s’effectuer dès le début des opérations. Par exemple, notre intérêt porte aussi bien sur la séquence elle-même que sur l’ordre du jour et le compte rendu qui peuvent être produits. Ces données apporteront ainsi certaines perspectives d’un même événement. Une approche situationnelle à vision multiple sera ainsi accessible à l’analyste.

L’étude « à distance » observera le déploiement des ENT dans la région Languedoc Roussillon, selon le calendrier de mise en œuvre établi par l’UNR. Il consiste à prendre en compte les quatre orientations de mise en œuvre :

  • Participation à l’étude des besoins, au niveau global et  au niveau de la mise en place des infrastructures et des services,

  • Suivi de la mise en Å“uvre du dispositif sur site test (Université de Perpignan et Universités de Montpellier)

  • Evaluation du déploiement du dispositif sur l’ensemble des sites et des conditions de mise en service en grandeur réelle.

  • Observation et analyse de l’utilisation des TIC par les usagers.

Ces observations à distance du déploiement de la mise en place du dispositif se croiseront avec celles en gros plans.

Une analyse en « gros plans » s’appuie sur des enregistrements d’activités se situant dans chacune des phases de mise en place et d’expérimentation de l’ENT. Dans la première phase, il s’agit essentiellement de périodes de réunions, desquelles ont été extraites des séquences qui ont été jugées signifiantes pour comprendre la mise en place de pratiques routinisées.

Pour illustrer ces observations, nous analyserons deux séquences, tirées de deux réunions d’information qui se situent dans une phase préparatoire d’information avant la mise en place de l’ENT. La première, coordonnée par le chef de projet de l’UNR et la responsable de l’enseignement à distance d’un établissement universitaire, a pour cible les enseignants d’un même établissement et se situe en mars 2004 ; la seconde, effectuée par une responsable technique, s’adresse essentiellement à un personnel administratif et technique issu de plusieurs établissements, et se déroule en juin 2004.

Notre propos est ainsi de comprendre « l’organisation de l’expérience » (Goffman 1991) par l’analyse de phénomènes extraits de ces séquences. Si des événements ou des faits viennent contrarier le déroulement de l’attendu, le segment perturbé demande une analyse et peut provoquer à plus long terme un changement du cadre. La recherche de ces indices saillants constitue l’une des bases de l’analyse.

L’analyse de deux séquences nous démontrera en quoi les connaissances partagées participent à la définition d’un cadre primaire commun. La compréhension de l’organisation du dispositif lui-même constitue un des points de rencontre entre les participants au projet. Chacune des séquences proposées montre deux états, un échec et une réussite dans la mise en commun des perspectives. La première souligne l’absence d’horizon partagé qui interdit toute proposition d’usages. La seconde met en valeur le fait que des participants coopèrent et qu’une entente s’établit pour énoncer des usages attendus. Notons aussi que les cibles sont différentes, enseignante pour la première et administrative pour la seconde et qu’elles se situent à des moments décalés chronologiquement : la première s’est déroulée deux mois avant la deuxième. Enfin, l’analyse des séquences enregistrées donne la possibilité d’accéder à « ce qu’un acteur individuel peut abriter dans son esprit » (Goffman 1991 : 22).

Les conventions de transcription sont détaillées en fin d’article.

Participants : Responsables de la mise en place de l’UNR (R1 et R2), responsable  EAD (R3), enseignants d’un même établissement (soit en groupe, E, soit individualisé E1, E2,  …).

Image1

Le principal motif de la réunion concernée est une information ciblée sur la notion d’environnement et de dispositifs virtuels puisque ceux-ci doivent se mettre en place dans les mois qui suivent cette rencontre. Si les responsables de la mise en œuvre connaissent les principes de fonctionnement, ce n’est pas le cas des utilisateurs futurs qui sont les enseignants. Trois catégories d’acteurs sont ainsi à différencier, les initiés (R1, R2) n’appartenant pas à l’établissement mais totalement engagés dans la mise en œuvre du projet, les informés (R3) ayant acquis des connaissances par des rencontres antérieures avec la première catégorie et les non-initiés (l’ensemble E) qui n’ont pas d’idées précises sur les dispositifs présentés ; la deuxième et troisième catégorie appartiennent au même établissement. La réunion a en fait pour objectif de faire passer la troisième catégorie au moins dans la deuxième.

L’absence de connaissances partagées portant sur les environnements éducatifs virtuels provoque des prises de parole mettant en avant l’incompréhension des acteurs de la troisième catégorie et parfois de la deuxième. Si la prise de parole de la personne responsable de l’enseignement à distance (R3) marque l’objet de la réunion « rassurer » :

parce que (-) le but de ma réunion c’est de: (-)
>rassurer< les gens. [(-)]= (1-2),

Elle expose aussi des inquiétudes qui s’affirment dans l’intervention d’une enseignante (E1) :

j’aimerais comprendre sur le plan plus général (.) (14).

L’étude des échanges entre les deux personnes met à jour l’absence de perspectives communes. En effet, tout d’abord l’enseignante dans une modalisation interrogative montre son incompréhension à relier deux instances qu’elle a du mal à reconnaître.

Elle épelle les termes qui désignent l’organisation et le dispositif :

puis (-) (toux) >clairement<  l’>UNR< (.) et l’U
(.) O(-)M (.) >L R<. (-) quel est le lien entre
notre enseignement à distance à l’université.(17-19),

alors que les personnes qui étaient sur l’estrade les avaient énoncés dans une fluidité affirmée. Ainsi, elle oppose d’un côté des éléments inconnus (UNR et UO-MLR) à celui d’un connu qui est dans sa sphère quotidienne (« notre enseignement à distance ») et demande une explication qui lui permette d’appréhender, voire de s’approprier les nouveaux éléments qui lui sont proposés ; d’ailleurs la désignation finale marquée par le terme de « choses » confirme l’absence d’un territoire commun de connaissances :

oui (-) mais quel est le lien avec ces deux autres
choses dont on a parlé (29-30).

Ces phénomènes de ratages et de choix lexicaux donnent accès à la construction, ou plutôt dans ce cas à l’absence de reconnaissance de la thématique avancée. Ils sont l’expression d’un échec dans la réception attendue de la présentation. Ils concrétisent l’état de gêne d’une personne qui n’a pas accès au sens car toutes les informations ne lui ont pas été transmises. Celle-ci ne perçoit donc pas les dispositifs en question qu’ils soient sociaux ou technologiques dans le domaine qui la préoccupe, l’enseignement à distance. Un gros plan sur les échanges entre les catégories discernées met en avant la difficulté d’intercompréhension entre les catégories ; les échecs de désignation confirment la difficulté de la troisième catégorie à seulement passer à la deuxième. En fait, cette absence de concrétisation empêche toute énonciation de besoins et encore moins de demandes. La discussion sur les usages ne peut s’effectuer à ce stade car le dispositif social, pédagogique et technologique lui-même n’est pas appréhendé.

Lieu : Etablissement universitaire

Participants : Responsables de la mise en place de l’UNR (R1 et R2) ; Responsable technique (R3).

Image2

L’objectif de la deuxième séquence est de présenter à des participants au projet UNR le fonctionnement d’un ENT dans une autre région en France ; les acteurs de la deuxième séquence qui prennent la parole appartiennent tous à la première catégorie, celle des initiés tandis que les autres participants qui n’interviennent pas dans l’interaction sont de la deuxième ou troisième catégorie. Les intervenants ont ainsi une connaissance partagée sur le dispositif d’un ENT. La présentation effectuée par une responsable technique fait référence à l’état existant d’un ENT dans une région donnée ; elle montre les possibilités d’actions pour un étudiant sous forme d’une énumération verbale associée à une visualisation verbale accessible à l’ensemble des personnes présentes. La formulation des actions envisagées est donc associée à une navigation perceptible  par tous. Les activités sont ainsi décrites et visualisées. La description effectuée élabore le contexte en faisant référence à des documents présents sur l’écran par des énoncés indexicalisés :

ce sont des documents que j’ai enregistrés (S2 : 1-2)
ces adresses-là (S2 : 6)

L’usage attendu se voit stabilisé par la description de la pratique décrite. Les expressions indexicales ordonnent l’organisation et confortent la réalité de l’usage explicité : elles sont le témoignage de l’usage envisagé (Garfinkel et Sacks, 1986).

Le deuxième phénomène saillant que nous relèverons montre également que l’expression indexicale construit une réalité immédiate qui modifie le comportement verbal et induit une potentialité d’usages. Dans cette séquence, l’expression d’une plaisanterie change le comportement verbal de la présentatrice, obligée de réagir à une intervention et à celle de l’environnement participatif. Dans une présentation qui se voudrait formelle, l’introduction d’un mot d’esprit émise par l’un des responsables, introduit, dans la partie "agenda", une pratique que nous pourrions énoncer de la manière suivante : « ne pas mettre des actions que l’on fait systématiquement tous les jours ».

ça c’est tous les jours les trucs qui reviennent tous les jours il faut pas les mettre (S2 : 17-19)

La  référence à ce qui vient d’être dit suggère un  comportement qui est confirmé par la plaisanterie énoncée.

Ces événements que l’on peut juger comme furtifs ou anodins constituent en fait des éléments constructeurs des usages. La première séquence montre la difficulté d’ « imaginer » des usages quand le dispositif n’est pas réellement effectif et que les connaissances ne sont pas partagées entre tous les participants et la deuxième montre que les énoncés indexicaux permettent de faire référence à des actions en train de s’accomplir, de les modifier par une visualisation effective de l’action en cours : c’est une première perception des usages.

L’approche présentée montre que l’analyse des interactions verbales constitue une première approche des usages même si ces derniers ne sont pas encore effectifs. L’attention portée à ce qui se dit et se fait donne la possibilité d’induire les usages attendus. L’explicitation des attentes et des intentions profile une première typologie de pratiques émergentes qui constituera un premier cadre primaire lors de l’observation des usages réels. En effet, sachant que le déterminisme technique n’est plus de mise, nous cernons dans un premier temps, les schèmes d’usage attendus des technologies présentes dans les ENT et verbalisés lors de présentations publiques. Nous allons différencier ceux venant du comportement des individus et ceux présents dans l’environnement technologique dans la logique d’une cognition située et distribuée. L’observation attentive des comportements des différents acteurs tout au long de la mise en œuvre et de la  place du projet développé s’avère essentielle dans la constitution des pratiques routinisées. En cela, l’analyse interactionnelle constitue un outil pertinent et adapté à une recherche sur les usages.

Pour citer cet article :  Charnet Chantal (2005). "Des usages attendus aux usages effectifs dans l’ENT de l’UNR-Languedoc Roussillon".  Actes des 5 et 6èmes Rencontres Réseaux Humains / Réseaux Technologiques.  Poitiers et La Rochelle,  16 et 17 mai 2003 – 25 et 26 juin 2004.  "Documents, Actes et Rapports pour l'Education", CNDP, p. 123-132.

En ligne : http://edel.univ-poitiers.fr/rhrt/document692.php

Notes

Bibliographie

CHARLIER Bernadette et PERAYA Daniel,Technologie et innovation en pédagogie, Bruxelles : de Boeck, 2003.

CONEIN Bernard, « L’action avec les objets. Un autre visage de l’action située ? », Raisons Pratiques 8, 1997, Cognition et information en société,  25-46.

DELMAS  Céline, " « 100 fenêtres sur Internet » : Représentations et usages d'Internet par le grand public  - Communication interpersonnelle au sein d'un réseau urbain ". RHRT  - Actes 2003  - Ateliers.

GARFINKEL Harold (ed.), Ethnomethodological Studies of Work, Taylor &Francis Ltd., 1986

GOFFMAN Erving, Les cadres de l’expérience, Paris : Editions de Minuit, 1974/1991.

HEATH Chrsitian  & LUFF Paul,  Technology in Action, Cambridge University Press, 2000

LAVE J., WENGER, E., Situated Learning: Legitimate Peripheral Participation, Cambridge: Cambridge University Press, 1991

NORMAN A. Donald, «  Les artefacts cognitifs », Raisons Pratiques 4, Les objets dans l’action, 1993, 15-34.

Annexes

Conventions de transcription
Enoncés en chevauchement

Le moment où un énoncé en cours en rencontre un autre est signalé par un crochet simple à gauche : [ La fin du chevauchement est signalée par un crochet simple à droite : ]

Enoncés continus

Quand il n'existe aucun intervalle entre les énoncés adjacents, le second est produit immédiatement après le premier (sans chevauchement). Ils sont liés par des signes d'égalité (continuité) : =

Les signes d'égalité sont aussi utilisés pour lier différentes parties d'un énoncé produit par un même locuteur.

Intervalles à l'intérieur des énoncés et entre les énoncés

Quand les intervalles surviennent lors d'un flot de conversation, ils sont notés de la manière suivante selon la longueur de la pause: intervalle bref (.), intervalle plus long (--).

Caractéristiques de la production de parole

Deux points signalent une extension du son ou de la syllabe qui précède : "qui :::"

Les autres signes de ponctuation sont utilisés comme suit :

.  Un point indique une intonation descendante, pas nécessairement la fin d'une phrase.

,  Une virgule indique une intonation continue, pas nécessairement les propositions de phrase.

?  Un point d'interrogation indique une inflexion croissante et pas nécessairement une question.

!  Un point d'exclamation indique un ton animé et pas nécessairement une exclamation.

L'emphase est signalée par le soulignement : "le mien "

Les lettres en majuscules indiquent ce qui est dit avec un volume plus haut que la conversation en cours.

Le signe de degré est utilisé pour indiquer un passage de la conversation plus calme que le reste de la conversation en cours : °Um: :°'

Une partie de l'énoncé est prononcée à un rythme plus rapide que la conversation en cours, est indiquée par des pointes: >  les manifestes <

Incertitudes

Les éléments contenus entre parenthèses simples relèvent de l'incertitude comme : ('pose que je ne suis) ou de l'impossibilité à distinguer le segment : (inaudible)

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n° 5-6

  • Chantal Charnet

    Maître de conférence HDR, Université Paul Valéry, Montpellier 3, CNRS FRE 2425.

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